You are currently viewing Pourquoi les achats en ligne affolent votre cerveau ?

Pourquoi les achats en ligne affolent votre cerveau ?

Avec l’essor du commerce en ligne et des applications de shopping, nos cerveaux sont constamment sollicités par des stimuli visuels et auditifs incitatifs à l’achat. Mais quels mécanismes cérébraux sont à l’œuvre lorsque nous nous adonnons à ces achats digitaux ? Après la carte bancaire, internet a facilité les achats coup de cœur. Une simplification du parcours client qui active des zones bien précises de votre psychisme. Digitalisation des achats : rencontre avec le cerveau de la tentation

Les trois principaux acteurs du drame

Avez-vous du mal à résister à la tentation face à un objet en vitrine qui vous ferait plaisir mais dont vous savez qu’il n’y a pas d’urgence à l’acquérir ? Vous arrive-t-il de succomber sur un coup de tête à un achat coup de cœur, puis de vous en vouloir ? Parvenez-vous à identifier les différentes parties en vous qui vous font éprouver un tiraillement, entre celle qui dit oui et celle qui dit non ? Et comment ce conflit mental s’inscrit-il dans les structures de votre cerveau ? Quoiqu’il en soit, le fait de céder trop facilement, comme celui de ne pas succomber à la tentation aura un impact sur l’image que vous avez de vous-même…

Sur le plan cérébral, le psychodrame se joue à trois : le noyau accumbens, une partie du striatum ventral qui traite les sensations de plaisir et joue un rôle central dans le circuit de récompense et dans les addictions, le cortex insulaire ou insula notamment impliqué dans les perceptions des phénomènes douloureux ou les sensations désagréables et le cortex préfrontal qui régit les fonctions cognitives supérieures et les fonctions exécutives.

Le noyau accumbens : la récompense et le plaisir

Le noyau accumbens, situé dans le cerveau profond, est une région clé du système de récompense. Il est impliqué dans la libération de dopamine, un neurotransmetteur associé au plaisir et à la motivation. Lorsque nous faisons des achats en ligne, le noyau accumbens est activé par l’anticipation d’une récompense, comme la satisfaction d’acquérir un nouvel objet ou de profiter d’une bonne affaire.

Les plateformes de commerce électronique exploitent ce mécanisme en créant un environnement qui stimule continuellement notre noyau accumbens, avec des offres spéciales, des réductions limitées dans le temps et des suggestions personnalisées. Cette activation constante de notre système de récompense peut nous inciter à acheter plus que ce dont nous avons réellement besoin, en quête d’une satisfaction toujours plus grande.

Le cortex insulaire : les émotions et la douleur

Le cortex insulaire, situé dans une zone profonde du cerveau, est impliqué dans la perception des émotions et la prise de risque. Il joue un rôle clé dans la manière dont nous évaluons les coûts et les bénéfices d’un achat, ainsi que dans la prise de décision sous l’influence de nos émotions.

Bien que le cortex insulaire joue un rôle dans la perception des émotions et la prise de risque, il est également impliqué dans la perception du dégoût et de la douleur. Ainsi, le cortex insulaire peut également agir comme un mécanisme inhibiteur pour contrer l’élan du noyau accumbens.

Dans le contexte des achats digitaux, le cortex insulaire peut contribuer à modérer nos comportements d’achat impulsifs en nous aidant à percevoir les conséquences négatives potentielles d’un achat, comme le regret, la culpabilité ou la détérioration de notre situation financière. Lorsque nous ressentons ces émotions négatives, le cortex insulaire peut envoyer des signaux d’alerte à notre cerveau, nous incitant à reconsidérer notre décision d’achat et à évaluer plus attentivement les coûts et les bénéfices associés.

Cependant, dans un environnement numérique où les techniques de marketing émotionnel sont omniprésentes, le cortex insulaire peut parfois être submergé, ce qui rend difficile la perception des conséquences négatives et l’inhibition des comportements d’achat impulsifs.

Le cortex préfrontal : la prise de décision et le contrôle

Le cortex préfrontal, situé dans la partie antérieure du cerveau, est responsable de la prise de décision, du contrôle des impulsions et de la planification à long terme. Lorsque nous faisons des achats en ligne, le cortex préfrontal est sollicité pour évaluer les avantages et les inconvénients d’un achat potentiel, ainsi que pour anticiper les conséquences de nos choix sur nos finances et notre bien-être.

Excitations et inhibitions des parties

En étudiant l’activité cérébrale de personnes en situation d’acquérir un bien, des chercheurs ont découvert les processus en jeu à l’occasion d’un scénario d’achat. Face à l’objet de la convoitise, la première structure à s’activer est le noyau accubens qui anticipe le plaisir lié à la future acquisition, ce qui a pour conséquence de libérer de la dopamine, « la molécule du plaisir ». Puis le cortex préfrontal entre en jeu évaluer le rapport entre la prévision de plaisir et l’estimation du coût de l’opération, en fonction du prix affiché par exemple.

Mais que se passe-t-il lorsque subitement, des images désagréables liées aux conséquences négatives de cet achat potentiel font irruption dans votre conscience ? C’est là que l’insula lié aux perceptions des phénomènes douloureux ou aux sensations désagréables vient peser sur la décision finale. Plus cette structure est activée moins vous serez tenté de céder aux impulsions du striatum et à son activité dopaminergique. En effet, l’insula s’active notamment lors des expériences émotionnelles désagréables, comme la perception de certaines images peu valorisantes. Il joue aussi un rôle spécifique dans l’expérience du dégoût. Or justement, son action aversive peut causer l’inhibition de neurones dopaminergiques via le cortex préfrontal. Ce dernier s’érige en juge de paix et peut, le cas échéant, inhiber l’excitation du striatum pour éteindre le désir.

Achat compulsif et image de soi

L’hypothèse aujourd’hui la plus probable est que l’expérience aversive de l’insula contrebalancerait l’anticipation de plaisir (et la libération de dopamine concomitante) délivrée par le noyau accumbens. À charge pour le cortex préfrontal de valider et de rationaliser la décision finale.

Celui-ci, vient ainsi réguler l’activité des deux autres structures afin de favoriser le choix le plus écologique pour la personne. Mais comme on en fait parfois l’expérience, il semble que lorsque la poussée émotionnelle compulsive est trop forte, il ne soit pas en mesure de jouer pleinement son rôle. Suractivé, le striatum, et plus précisément le noyau accumbens, passerait outre l’action inhibitrice de l’insula et la validation du cortex préfrontal. Vous balayez d’un revers de la main les projections négatives liées à cet achat et vous repartez avec le produit. En attendant d’être rattrapé par votre mauvaise conscience…

En effet, lorsque vous vous répandez en regrets suite à votre achat coup de cœur, l’image que vous vous faites de vous-même se trouve fortement dégradée. Vous vous apparaissez à vous-même comme quelqu’un de faible, manquant de volonté et d’incapable de se raisonner.

Mais ce n’est pas tout.

Il convient aussi de remarquer qu’à l’occasion d’un achat par carte bancaire ou en ligne, les zones cérébrales activées diffèrent de celles entrant en jeu lors d’un achat en espèces. Ce qui ne donne évidemment pas lieu aux mêmes freins.

Comment les achats digitalisés hackent votre cerveau

Ainsi, l’activité de l’insula en matière de consommation n’est pas le même selon la nature du règlement. Elle change selon qu’il s’agit d’un achat en espèces ou d’un achat en ligne ou par carte bancaire. En effet, dans ce second cas, cette zone cérébrale est nettement moins active, probablement en raison du caractère moins émotionnel de l’acte d’achat. De fait, ce n’est pas tout à fait la même chose d’appuyer sur un bouton vert de validation (qui nous signale que c’est OK), que de voir et de sentir l’argent dans sa main et de compter les billets ou les pièces. Des chercheurs ont noté une moindre activité de l’insula dans le cas d’un paiement par carte bancaire ou en ligne.

La douleur qu’il peut y avoir à compter des espèces n’est plus ressentie lorsqu’il s’agit d’appuyer sur un bouton de validation. Lors d’un achat digitalisé, l’impact émotionnel négatif se trouve nettement diminué, voire aboli.

En carte bancaire, acheter est aussi simple qu’appuyer sur OK

Achats compulsifs, addictions et image de soi

La digitalisation des échanges impacte donc différemment les aires cérébrales concernées. Et cela peut avoir des conséquences sur la façon dont le sujet se perçoit. Lorsque la proposition d’achat s’inscrit dans un parcours client simplifié, il devient plus facile d’y succomber. Même si elle ne repose pas sur un véritable besoin. Le tout, largement encouragé par le circuit de la récompense et ses décharges de dopamine. Un phénomène qui peut, après-coup, conduire le consommateur à éprouver des regrets et à ressentir l’image intérieure de quelqu’un qui ne maîtrise pas ses émotions.
De fait, il n’est plus rare de voir dans les cabinets de thérapeutes des consultants qui viennent pour des problématiques d’achats compulsifs en ligne. Dans certains cas, il s’agit clairement de phénomènes d’addiction.

Reprenez le contrôle sur votre cerveau

Pour éviter ce piège, il ne faut pas hésiter lorsqu’un achat vous pose problème à visualiser ce que cela représenterait si vous deviez payer en espèces. Ressentez toutes les sensations liées au fait de manipuler la fameuse somme. Sentir les billets défilés, entendre le bruit des pièces et du papier des billets, voir la somme que cela représente en espèce peut réveiller les zones de votre cerveau susceptibles de modérer votre frénésie d’achats compulsifs. Car si l’argent n’a pas d’odeur, sa représentation a tout de même de quoi éveiller vos autres sens.
C’est probablement l’une des meilleures façon de sortir l’insula de sa somnolence numérique et de vous éviter à terme de bien funestes regrets et une mauvaise conscience.


© Thérapie.info

Laisser un commentaire